"Sans la presse, nuit profonde." (Victor Hugo)
Twitter permet de trouver des informations, Twitter permet de relayer des informations. ... Et l'on a tous déjà été confrontés à une information “brute” sans savoir l'interpréter, sans savoir quoi en faire. L'ère du digital, c'est toujours la même problématique : tellement nombreux, et finalement si seul. Il n'y a que nous, notre raison et notre conscience, face à cette information que nous ne pouvons comprendre.
Alors oui, aujourd'hui, et demain encore plus, le journalisme est nécessaire : pour vérifier, compléter, contextualiser, mettre en relief, tempérer, nuancer, etc. ... Pour nous donner les clés, pour informer.
Chers Twittos, vous n'êtes pas journalistes...
On ne montre pas l'horreur, on informe. On ne montre pas des morts, des corps mutilés, etc., pas gratuitement. On ne fait pas dans le sensationnalisme ou le voyeurisme ! On pèse le pour et le contre, on pense aux répercussions... Mais surtout, on contextualise. La légende et l'article liés à une photographie doivent pouvoir justifier du choix de cette dernière !
Oui, cette photo est nécessaire, même historique si vous voulez... Et si elle a eu une influence sur les accords récents pour l'accueil des réfugiés en Europe, alors tant mieux... Mais ce n'était pas une raison pour la diffuser de cette manière, aussi massivement, et brute : l'image pour l'image.
Vous vous sentez puissants lorsque vous participez à la mise en TT d'un hashtag ? Vous pensez que votre voix compte ? ...Vous avez raison. Mais, alors sachez en être digne ! Tout pouvoir incombe des responsabilités.
J'aimerais aussi rappeler ici que l'âge moyen sur Twitter est de 22 ans, et que 53% des utilisateurs sont des adolescents (d'après le Blog du Modérateur). C'est bien de vouloir les préserver d'images choquantes lorsqu'il s'agit de fiction... Et lorsqu'il s'agit de la réalité ? Où sont les avertissements ? Où sont les signalétiques du CSA ?
Vous êtes vous aussi hypocrites.
Les Twittos sont des passionnés
Juste une petite parenthèse : Parce que l'impact et le traitement médiatique de ce drame me font penser à autre chose... Où êtes-vous aujourd'hui ? 8 mois, c'est déjà de l'histoire ancienne ? (Ok j'avoue, elle était facile)
En devenant un symbole, il perd son humanité.
Un petit corps sans vie, naufragé sur une plage turque. C'est ce que l'histoire retiendra. C'est tout ce que l'histoire retiendra. En exhibant à outrance ce petit corps sans vie, vous en avez fait un symbole... Mais vous avez déjà oublié l'essentiel : Il s'agit d'une personne. Il s'agit d'un enfant. Un petit Syrien de 3 ans. Un frère. Un fils. L'exposer ainsi c'est lui manquer de respect à lui et à sa famille. (Et je ne parle même pas des montages absolument révoltants et inacceptables, qui eux aussi tournent déjà sur le réseau... en toute impunité.)
Encore une fois, bien sûr que cette photo est nécessaire... mais pas de cette manière.
D'après ce journaliste, correspondant au Canada : La tante du petit Aylan aimerait que l'on arrête d'utiliser et de diffuser les photos de la plage...Les photos de son neveu noyé, mort. Elle souhaite que le monde se souvienne de son sourire.
La mémoire courte.
Selon l'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) il y a eu cette année 2701 morts en Méditerranée. Entre le 1er janvier 2015 et le 3 septembre 2015, il y a déjà eu 2701 morts en Méditerranée. Pardon, j'insiste, mais ça veut tout de même dire qu'en 9 mois, 2700 personnes ainsi que le petit Aylan ont trouvé la mort en Méditerranée.
Et cette crise des “migrants”, aujourd'hui “réfugiés” ne date pas d’hier, loin de là. Je vous propose de revoir cet extrait du Petit Journal du 20 avril 2015 pour vous en rendre compte, ou vous le remémorer. C'est ponctué de silences et de répétitions (“nouveau drame”, “pire drame”). On insiste sur le temps, l'inaction, et le nombre de victimes : déjà 22400 morts en Méditerranée depuis 2000 (toujours selon OIM).
...Alors, si vous aviez besoin de cette récente image pour ouvrir les yeux, très bien... Moi, ce n'est pas mon cas. Et encore moins de cette façon.
Mais oui, cette histoire aurait dû finir autrement.
À bientôt,
Lo.LA